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Assemblée de Corse : Polémique sur un déplacement à Paoli City et sur fond d’activisme diplomatique
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Assemblée de Corse : Polémique sur un déplacement à Paoli City et sur fond d’activisme diplomatique


Calvi

Par

Le 29 Mars 2018


L’opposition n’apprécie guère les déplacements de l’Exécutif corse, hors sol français. Après une polémique sur les Baléares, le Val d’Aoste… et tout dernièrement la Bulgarie, c’est, aujourd’hui, un déplacement américain à Paoli City en Pennsylvanie qui est dans la ligne de mire de la gauche et la droite insulaires. La semaine prochaine, pendant trois jours, du 4 au 6 avril, une délégation, conduite par le président de l’Exécutif, Gilles Simeoni, foulera le sol américain pour commémorer l’anniversaire de Pasquale Paoli, le père de la nation corse et inspirateur de la Constitution des Etats-Unis, dans une ville qui porte son nom. « Cette rencontre avec les autorités de Paoli City avait été annoncée pour avril 2017 dans le cadre d’un échange, prévu depuis un an, pour célébrer 50 ans d'amitié et de filiation corso-américaine. Nous répondions alors à la double invitation de la Paoli Business & Professional Association (PBPA) et de son représentant, Ed Auble, ainsi que de Jeffrey Rosen, Président du National Constitution Center de Philadelphie, qui souhaitait accueillir officiellement une délégation Corse à Philadelphie, afin d'évoquer la Constitution de Pasquale de Paoli, ses résonances certaines sur la Constitution américaine et envisager de la répertorier au National Constitution Center », explique Nanette Maupertuis, conseillère exécutive en charge des relations internationales et présidente de l’Agence de tourisme de Corse (ATC).

Du mécénat pour Ponte Novu
Pour des raisons de calendrier et de contraintes budgétaires, le déplacement avait été reporté à une date ultérieure, mais l’Exécutif avait accueilli les autorités de Paoli City en avril 2017 lors de la visite officielle du Consul général des Etats-Unis. Pour l’occasion, une conférence sur Paoli et l’Amérique avait été organisée. Une réunion technique avait permis de procéder à un état des lieux du mécénat mobilisable auprès de la diaspora corse aux Etats-Unis, et d’engager une réflexion sur les conditions à mettre en œuvre pour faciliter les retours de cette diaspora, internationaliser les échanges universitaires et amorcer une coopération culturelle et économique pérenne entre la Corse et la Pennsylvanie. « Le premier bilan est déjà très positif puisque des échanges interuniversitaires avec West Chester University sont d’ores et déjà en cours. Des démarches ont été engagées dans le cadre d’un mécénat d’entreprises pour la réhabilitation du patrimoine lié à la mémoire de Pasquale Paoli. Ed Auble est reparti avec, dans ses valises, le projet de réhabilitation du Pont de Ponte Novu. Depuis un an, les services de la Direction du Patrimoine travaillent sur cette opération qui s’élève à 2 millions € », poursuit Nanette Maupertuis. Les Américains désirant élargir ce mécénat, d’autres pistes sont à l’étude, notamment la Strada Paolina, mais également des investissements dans le domaine des nouvelles technologies et des énergies renouvelables.

Une coopération à construire
« Pour concrétiser le financement de ces projets structurants, il était impératif de se rencontrer. Au moment d’arrêter une date, celle de l’anniversaire de Pasquale Paoli le 5 avril s’est révélée symboliquement la plus adaptée pour formaliser cette coopération ». Lors de ce déplacement, la délégation insulaire rencontrera la Paoli Business, un réseau d’affaires particulièrement influent à Paoli City, dont les membres, tous chefs d’entreprise, financent des actions structurelles, éducatives ou patrimoniales en Pennsylvanie ou en lien avec cet Etat. « Du fait de la filiation avec la Corse au travers de Pasquale Paoli, ils proposent de s’impliquer dans le développement de l’île par des actions de mécénat. La dynamique de coopération, ainsi créée, bénéficiera, aussi, aux entreprises corses qui pourront, si elles le souhaitent, conclure des partenariats économiques avec ce réseau d’entreprises », précise la conseillère exécutive. La délégation sera accueillie au National Constitution Center pour y présenter la Constitution de Corse et « rappeler l’influence qui a été la sienne dans la rédaction de la Constitution américaine. Ce déplacement permettra de répertorier symboliquement la Constitution de Corse dans les fonds du National Constitution Center ». Elle donnera, ensuite, au Lafayette College, une conférence sur l’évolution institutionnelle de la Corse depuis Pasquale Paoli, évoquera la réforme constitutionnelle en cours et les enjeux de l’obtention d’un statut d’autonomie pour le développement économique, social et culturel de l’île.

Des retombées escomptées
Pour l’Exécutif, ce déplacement est en en totale conformité avec la feuille de route validée par deux fois à l’unanimité, - à l’exception du Front National -, par l’Assemblée de Corse, l’année dernière. « L’aspect symbolique et mémoriel de cette coopération est essentiel car il structure et soude la coopération économique. Il ouvre, également, des horizons nouveaux en matière de développement touristique par une offre patrimoniale et culturelle autour de l’imaginaire révolutionnaire de Pasquale Paoli aux Etats-Unis. Les retombées escomptées dans les différents secteurs sont donc particulièrement importantes ». Il s’inscrit surtout dans la stratégie d’internationalisation prônée par les Nationalistes depuis des décennies et mise en place dès leur prise de pouvoir en décembre 2015. « Aujourd’hui les régions françaises structurent et renforcent leur action à l’international pour trouver d’autres sources de financement face au tarissement des dotations d’Etat. Notre action en matière de politique internationale est connue. Elle est construite autour de trois piliers, la coopération institutionnelle, la coopération culturelle et patrimoniale, et la coopération économique. L’objectif étant de diversifier nos sources de financement tout en donnant du sens à nos échanges internationaux ».

Un activisme diplomatique
Si l’intérêt d’un tel déplacement n’est pas vraiment contesté par l’opposition, la droite, comme la gauche, émettent en chœur des réticences, voire de la désapprobation, tant sur l’importance de la délégation et son coût que sur le parti-pris idéologique de la destination. La première salve est tirée par le président du groupe Per l’Avvene, Jean-Martin Mondoloni : « S’il ne s’agissait que de la prise en charge des deux conférenciers spécialisés, qui y ont toute leur place, nous y souscririons volontiers. Mais qu’une délégation d’une dizaine d’élus parte aux Etats-Unis au coût moyen de 4600 € par personne, ce n’est pas raisonnable. Ca relève de l’indécence, vue notre situation financière. Au-delà, ce projet comprend deux faces cachées. D’une part, la mobilité quasi frénétique de la majorité, sous couvert d’activisme diplomatique, qui nécessitera un bilan sur les retombées à tout niveau et sur le coût occasionné. D’autre part, vous partez pour cultiver une certaine vision de l’œuvre de Pascal Paoli, politique, voire idéologique ». La délégation devrait, finalement, se composer, outre Gilles Simeoni et Nanette Maupertuis, de deux autres élus : la conseillère exécutive en charge de la culture, Josepha Giacometti, du vice-président de l’Assemblée de Corse, Hyacinthe Vanni, et des deux conférenciers, Catherine Sorba et Francis Beretti. Le président Talamoni et le président de l’ADEC, Jean-Christophe Angelini, ont décliné l’invitation. Les quatre présidents des groupes politiques également. « Nous ne partirons pas à Paoli City dans le cadre de ce déplacement. Nous proposons un amendement consistant à laisser notre place à des personnalités qualifiées qui auront un regard scientifique démystifié et une vision différente de l’œuvre de Paoli. Ce serait leur place, ce n’est pas la nôtre », déclare l’élu de droite.

La croisière s’amuse
Un avis presqu’entièrement partagé par Jean-Charles Orsucci, président du groupe Andà per Dumane : « Nous ne participerons pas au voyage. Des déplacements ont un sens, comme ceux qui ont consisté à se rapprocher de la Ligurie ou de la Sardaigne, mais faut-il se rapprocher de toutes les diasporas corses ? Nous pensons qu’il faut renvoyer comme image à la population, qui est dans l’attente, que nous sommes à 200% dans la gestion de la Collectivité. Se déplacer est-ce une image que nous devons envoyer à la Corse ? Y aller en délégation et renvoyer l’image de la Croisière s’amuse ! La diaspora du continent doit être à nos côtés, c’est elle que l’on doit convaincre de nous aider. Ce déplacement-là n’est pas bon en termes de communication ». La présidente du groupe La Corse dans la République,Valérie Bozzi, enfonce brièvement le clou : « Le signal envoyé par ce voyage est négatif. Il faut se concentrer sur la Corse et les Corses. C’est notre priorité, c’est la vôtre aujourd’hui. Y envoyer deux historiens, c’est une bonne chose, y envoyer une délégation est un mauvais signal ».

Une région sinistrée
Pierre Ghionga fait, comme à son habitude, entendre une voix discordante : « Je ne veux pas aller à Paoli City, mais je suis favorable à ce voyage ». Les deux élus de la micro-région, Hyacinthe Vanni et Catherine Cognetti-Turchini, ne boudent pas cette opportunité. « S’il faut aller faire du lobbying et trouver du mécénat, cela ne me dérange pas. Si on peut transformer Ponte Novu et le musée de Murusaglia, pourquoi s’en priver ! On ne peut pas se contenter de ce qu’on a. Notre région d’u Rustinu et d’e Valle est sinistrée. On sait ce qu’on peut faire et ce que la Via Paolina peut nous apporter », commente le premier. « Nous avions déjà rencontré les représentants de Paoli City. Nous avons beaucoup travaillé sur ce dossier et sur le couvent. Si la CTC pouvait nous aider, ce serait prometteur pour la commune et le projet », reconnaît la seconde.

Défendre les intérêts de la Corse
L’Exécutif, qui n’apprécie pas du tout le procès d’intention que lui intente l’opposition, rejette d’une chiquenaude l’amendement de la droite et riposte en rafales. « Je suis assez chagrinée qu’on nous accuse d’activisme diplomatique. Notre politique européenne et internationale a été insuffisamment développée. Nous avons la chance d’avoir deux personnages historiques que tout le monde nous envie : Napoléon, le personnage le plus connu après le Christ, et Pasquale Paoli. Nous allons à Paoli City qui a été le lieu d’une bataille, qui a le buste de Paoli en hommage à ce petit pays, la Corse, qui a produit la première Constitution au monde, une Constitution que les Américains encensent encore », réplique Nanette Maupertuis. Elle liste 7 ou 8 bonnes raisons de faire « Ce qui n’est ni un voyage, ni une promenade ! Quand nous nous déplaçons, nous le faisons pour défendre l’intérêt de la Corse et des Corses, les gains que nous attendons de ces déplacements sont bien supérieurs aux coûts. Le commerce international ne se fait pas en restant à la maison et en envoyant des mails ! Des Américains sont prêts à venir en Corse expliquer aux chefs d’entreprise insulaires le soutien au développement et à l’innovation qu’ils pourront donner à la région. C’est intéressant d’un point de vue technologique, scientifique, notamment sur les questions de développement durable et d’énergie recyclable, et au niveau des échanges avec les étudiants. Le Consul américain est, aussi, très intéressé par la recherche sous-marine et le nombre important d’épaves de bateau que recèlent les fonds marins corses. Le coût de ce déplacement s’élève à 12 000 €. On passerait vraiment à côté de retombées économiques et touristiques dans un futur proche ». Et lance : « 48 heures aux USA avec le nombre d’heures de vol et le décalage horaire, ce n’est pas la croisière s’amuse, et ce n’est pas une partie de plaisir ! ».

Un procès injuste
Tout aussi remontée, Josepha Giacometti accuse l’opposition de commettre « une erreur très grave. Nous menons une politique internationale, mais nous n’en sommes pas moins au quotidien au service des Corses. C’est un faux procès que l’on nous fait, un procès injuste ! ». Et tacle la frilosité de ceux qui ergotent : « Nous ne croyons pas assez en nous-mêmes pour valoriser ce que nous sommes. La culture et l’histoire ne sont que la porte d’entrée d’accords de coopération. Paoli renvoie à une histoire, à une Constitution, à une certaine idée de la liberté. Cette entrée culturelle, cet ancrage dans l’international, sont un moyen de construire une politique d’échange culturelle et de coopération affermie. Nous allons rencontrer des leaders, des chefs d’entreprise qui regardent la Corse avec une certaine bienveillance et sont prêts à nous aider. Nous mettons en place une politique de coopération internationale qui porte ses fruits. Chaque fois que nous tissons un lien à partir du culturel et de l’histoire, nous le faisons pour construire la Corse ».

Des retours sur dépense
Les interrogations de l’opposition sur le bien-fondé de ce déplacement ne sont pas plus du goût de Gilles Simeoni qui estime, de son devoir et de sa responsabilité, d’engager une coopération européenne et internationale. « Nous sommes mobilisés à 100 % dans les problèmes du quotidien, mais nous devons impérativement faire ce voyage. Ce rendez-vous est le fruit d’un travail de fond. Le remettre ou le différer, c’est y renoncer. Nous tenons à optimiser les déplacements que nous faisons. Le 6 avril, la Constitution de Paoli sera officiellement intégrée dans le temple où se trouvent tous les textes importants des USA, et reconnue comme un élément ayant inspiré la Constitution américaine. La Corse est, ainsi, distinguée comme ayant contribué à fonder la démocratie et la liberté dans le monde ». Il évoque des échanges avec l’université, Stella Mare, PaoliTech… « Nous sommes attendus par toutes les associations de Corses de la diaspora américaine qui sont très actives. Des contributeurs potentiels ont envie de réinvestir dans ce lien très distendu avec notre île à travers des opérations de mécénat. Je veux dire aux Corses que ces euros ne sont pas déposés en vain, mais investis pour la Corse et que les retours que nous en attendons d’un point de vue économique, culturel, touristique et politique sont importants ».
Le rapport a été adopté, l’opposition n’a pas participé au vote ou s’est abstenue.

N.M.
 



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